Vous êtes ici

Né dans le quartier, le groupe Pro-Inter s’est étendu à toute l’Alsace. Dans son fief historique, l’enseigne spécialisée en produits orientaux continue d’étendre son réseau commercial.

Le rouge des poivrons, le vert des courgettes et les affiches jaunes des promotions contrastent avec le ciel gris de ce samedi 9 novembre. Une fois par mois, durant trois jours, un gros arrivage de fruits et légumes transforme l’entrée du Pro-Inter de la Montagne-Verte en un marché à ciel ouvert. Un balai de voitures défile dans la petite rue qui mène au supermarché. Ce samedi, cet espace de 500m2 va attirer "entre 1 000 et 2 000 clients", selon la responsable du magasin.

Fatima, Nadia et leurs deux amies tirent chacune un chariot. Elles viennent toutes les semaines, ensemble, "pour les fruits et légumes, parce que c’est moins cher". Des mangues du Brésil vendues 1,50 euro l’unité, comme le kilo de patates douces importées d’Egypte ; le kilo de pommes de terre à 70 centimes, les tomates à 2 euros. Des prix qui défient toute concurrence.

[ Plein écran ]

La samedi, entre 1 000 et 2 000 clients viennent se fournir au Pro-Inter historique de la Montagne-Verte. © Mathis Nicod

Onze Pro-Inter sont implantés en Alsace et dans le Territoire de Belfort, mais l’entreprise est née ici, au 206 route de Schirmeck. Le fondateur, Dursun Asan, arrive en France en 1974, à 27 ans. Dix ans plus tard, il achète une épicerie avenue du Neuhof pour 110 000 francs et en 1992, il fonde Produits Internationaux, ou Pro-Inter, avec ses quatre fils Souleyman, Salih, Selman et Salim. Ce premier supermarché va en amener d’autres. Pro-Inter se revendique aujourd’hui comme une "référence régionale". "Le papa était boucher, il avait un local bidon, maintenant le groupe joue dans la cour des grands", résume Hakim*, un habitant du quartier qui connaît bien la famille.

© Alizée Grides et Mathis Nicod-Frey 

En 2018, Dursun Asan décède. Il avait préparé sa succession en regroupant toutes les activités dans une holding, où sont associés les quatre fils. Salih s’occupe aujourd’hui de la branche "centrale d’achat" du groupe créée en 2005. Ses trois frères se répartissent les différents points de vente. La troisième génération Asan prend aujourd’hui le relais. Ahmed gère le Pro-Inter de Schiltigheim, Erkam a hérité des parts de son père Selman, décédé en 2011. À travers sa société Centerkam, il possède trois supermarchés dans le Haut-Rhin et celui de Bessoncourt.

Difficile de répertorier et de cartographier toutes les branches du groupe, réparties entre les enfants et les petits-enfants. D’autant que les derniers comptes publiés datent de 2018.

La viande halal, un point fort 

La Montagne-Verte a vu fleurir une deuxième enseigne début 2023, au 269 route de Schirmeck. Le modèle est éprouvé : produits importés, large boucherie au fond du magasin. Derrière la vitrine d’environ 15 mètres de long s’affairent trois bouchers.

Sur le parking, Samira, aide-soignante venue des Poteries, charge son coffre de deux cabas pleins : "C’est moins cher que les grandes surfaces, et nous on mange halal. En plus il y a des promos si on achète de la viande en gros". "On doit faire le calcul tout le temps", lâche Dani, venu de Lingolsheim. Le paysagiste, barbe rasée de près et bonnet jaune sur la tête a deux garçons de 13 et 15 ans à nourrir. Lui aussi vient à Pro-Inter pour les tarifs attractifs. Mais à la sortie, il montre son ticket en faisant grise mine : 90 euros pour deux sacs plastiques pleins. Hakim confirme : "Pro-Inter, c'est comme tout, c'est devenu cher. Surtout que moi, si je fais un barbecue, je n’y vais pas, je préfère les bonnes merguez du traiteur."

Fournisseur de broches

Grâce à sa centrale d'achat, basée à la Meinau, Pro-Inter livre des fast-food en viande halal. Rien qu’à la Montagne-Verte, l’enseigne fournit sept restaurants, dont le Doy Doy qui achète deux broches hebdomadaires, soit 50 kg de poulet, pour 300 euros, et 25 kg de bœuf. Planet Lunch, une chaîne de pizzas, affirme dépenser 1 500 euros par semaine de viande et de légumes au Pro-Inter d’en face. Certains restaurateurs arborent la provenance de leur broche en vitrine, comme argument de vente.

Alizée Grides
et Mathis Nicod-Frey

* le prénom a été changé

[ Plein écran ]

Comme six autres restaurants de la Montagne-Verte, le Doy Doy se fournit chez Pro-Inter pour ses broches. © Alizée Grides

Imprimer la page