Avec près de 500 000 apprentis en 2019, l’apprentissage n’a jamais autant attiré. Un succès dû à une réforme du système en septembre 2018, mais aussi à un changement d’image.
Crédit : gouvernement.fr
L’apprentissage, une voie d’excellence ? Avec 491 000 apprentis au 31 décembre 2019, cette forme d’enseignement, mêlant cours théorique et travail en entreprise, connaît en tout cas un grand succès. En un an, le nombre d’apprentis a augmenté de 16 %. Une hausse encore inégalée et qui profite à tous les secteurs, comme l’industrie (+11 %) ou le BTP (+13 %). La barre jamais franchie des 500.000 apprentis pourrait être atteinte prochainement
Amélioration des conditions d’accès et d’emploi
Un succès dont se félicite le gouvernement. Selon Muriel Pénicaud, ce boom est la conséquence de « la suppression des règles qui bridaient le développement de l'apprentissage » grâce à une réforme votée en septembre 2018. En effet, l’entrée en Centre de formation des apprentis (CFA) a été assouplie. La limite d’âge a été repoussée de 26 à 30 ans. Les apprentis qui n’auraient pas encore trouvé d’entreprise pour les embaucher en septembre peuvent à présent prolonger leurs recherches et entrer en CFA en cours d’année. Les conditions d’emploi ont aussi été largement améliorées, avec une revalorisation des salaires ainsi qu’une aide de 500 euros pour passer le permis de conduire. Pour les entreprises également, les règles sont devenues plus flexibles.
Résultat, après une décennie difficile, les effectifs repartent à la hausse pour les CAP et bac pro. Le nombre d'apprentis a augmenté de 37% chez les Compagnons du devoir, de 15% dans les Maisons familiales rurales et de 3% dans les Chambres des métiers et de l'artisanat (CMA).
Un changement d’image
Si ces mesures améliorent de façon certaine le statut des apprentis, cette formation bénéficie dans le même temps d’un changement d’image. Longtemps considéré comme une voie de garage, réservé aux mauvais élèves, l’apprentissage acquiert aujourd‘hui ses lettres de noblesse. Ce cursus pratique compte de plus en plus d’élèves déjà diplômés, attirés par un retour aux métiers manuels et une certaine sécurité de l’emploi : car après l’apprentissage près de sept apprentis sur dix trouvent un travail dans les six mois.
C’est le cas de Laurine Pichot, 19 ans. Après un bac littéraire et des études d’art à Paris, cette jeune strasbourgeoise suit aujourd’hui une formation de plâtrier staffeur aux Compagnons du devoir. Un parcours qu’elle n’aurait jamais envisagé plus jeune. « Mes parents voulaient que je fasse de longues études, mais aujourd’hui ils ont compris que je peux réussir comme ça. » Laurine l’assure, l’image de l’apprentissage a changé : « Plus ça va et plus c’est valorisé. Une personne avec un bac ou une licence 1, est moins mal vu quand elle reprend un peu les bases. Je trouve ça bien et je suis contente qu’on revienne là-dessus. »
Les masters et grandes écoles aussi
Aujourd’hui l’apprentissage n’est plus réservé aux seuls métiers manuels, bien au contraire. C’est même dans le supérieur que la réforme de l’apprentissage a eu le plus de succès : plus 30% d’apprentis en un an. Les facultés développent des dizaines de nouveaux cursus qui attirent de plus en plus d’étudiants de master ou de grandes écoles.
A 22 ans, Joaquim Ventura est apprenti ingénieur en informatique dans une grande société. Il effectue un master en ingénierie du logiciel, ouvert à l’apprentissage. Une condition essentielle pour ce jeune homme modeste. « J’ai toujours été boursier, mes parents n’ont pas fait d’études. Je n’avais jamais imaginé pouvoir continuer en master. » Aujourd’hui c’est chose faite. En plus d’une certaine autonomie financière, l’alternance c’est aussi un gros plus sur son CV, qui fera la différence avec ses camarades. « Va voir n’importe quel employeur : tu as beau être diplômé bac + 36, si tu n’as pas d’expérience à coté, c’est zéro » s’exclame Joaquim.
Et ce n’est pas son maître d’apprentissage qui dira le contraire : Pour Dominique Laporte, les apprentis se distinguent des autres élèves : « Il y a une différence absolument gigantesque. Les jeunes qui viennent en alternance pendant deux ou trois ans ont une connaissance des rouages de l’entreprise qui est extrêmement précise, et ils sont opérationnels tout de suite ! » Dans sa société, Dominique Laporte emploie 32 apprentis sur 400 salariés et espère augmenter cet effectif.
Sophie Mercier
(publié le 19/02/2020)